mardi 19 septembre 2017

Chéri de Colette



Léa de Lonval, une courtisane de près de cinquante ans, est la maitresse de Fred Peloux, appelé Chéri. A mesure qu'elle éprouve le manque de conviction croissante de son jeune amant, Léa ressent, avec un émerveillement désenchanté et la lucidité de l'amertume, les moindres effets d'une passion qui sera la dernière. Pourtant il suffira à Chéri d'épouser la jeune et tendre Edmée pour comprendre que la rupture avec Léa ne va pas sans regrets. 


Petite pause dans mon mois spécial relecture avec Chéri de Colette. Ce n'était pas du tout prévu, mais lorsqu'on me l'a proposé en lecture commune, j'ai tout de suite sauté sur l'occasion ! 

Je ne sais pas trop comment parler de ce livre parce qu'il est assez différent de ce que je lis d'habitude, à savoir qu'ici l'intrigue... je dirais qu'il n'y en a pas vraiment. Tout est dans l'ambiance. 

J'ai trouvé qu'il était surtout question d'une époque, la belle ! Mais aussi de sa fin, au sein du cercle d'anciennes demi-mondaines.
La langueur de Léa donne le ton du roman, et c'est d'une douceur, d'une beauté qui laisse songeur.
Colette choisi ses mots à la perfection. Qu'il s'agisse de la décoration d'une pièce, de la moue d'un visage ou des rêveries des personnage, l'image est nette. Tellement nette qu'on a le sentiment de sentir la chaleur du soleil sur sa peau, l'odeur d'un chocolat mousseux ou la douceur d'un tissu soyeux.
Chaque ligne est un pure délice !

Je crois que c'est la première fois que j'aime un roman pour sa plume plutôt que son histoire. Déjà parce que je n'ai pas vraiment trouvé cette rupture très originale, mais surtout parce que le personnage de Chéri m'est insupportable ! J'ai trouvé que Léa était bien mieux sans ce gamin complètement égoïste et immature. Une vraie tête à claque !
Alors forcément, lorsque l'on n'aime qu'un personnage sur deux dans un couple, difficile d'avoir de la peine pour leur rupture.

Mais il y a aussi Léa, qui est une merveille, un pure bijou, à l'image du texte. Elle colle parfaitement à l'image que je me fais des cocottes, belle et raffinée avec un caractère bien trempé. Tout m'a charmé chez elle.

Même si l'histoire ne m'a pas vraiment passionnée, je vous recommande ce livre, qui n'est pas très long, pour la merveilleuse plume de Colette ! C'était la première fois que je la lisais et ce ne sera certainement pas la dernière !

Madame C.

mardi 12 septembre 2017

La Religieuse de Diderot



Un de ses amis, le marquis de Croismare, s'étant intéressé au sort d'une jeune femme qui demandait à sortir du couvent où elle avait été placée contre son gré, Diderot eut l'idée facétieuse, en 1760, de lui adresser des lettres prétendument écrites par la religieuse qui lui demandait secours. Le marquis tomba dans le piège, une correspondance s'ensuivit, et l'écrivain, pris à son propre piège, finit par composer les mémoires que Suzanne Simonin était censée avoir écrits à l'attention de Croismare.
"Effrayante satire des couvents" - la formule est de Diderot -, ce roman d'une destinée malheureuse est d'une impitoyable vérité. Mais d'une vérité également engagée, car derrière la voix de Suzanne résonne celle de l'auteur lui-même, qui ne consent pas à voir l'épanouissement humain entravé par l'enfermement ni les exigences de la nature bafouées par les complaisances conjointe des familles de l’Église.  Diderot y est présent tout entier. 


Pour la seconde fois cette année, j'ai décidé de consacrer ce mois de septembre à des relectures. J'ai envie de redécouvrir des livres oubliés et de faire un peu de tri dans ma bibliothèque. 
Et j'ai d'ailleurs eu le plaisir de commencer par une lecture commune ! C'était ma première et c'est vraiment agréable de pouvoir échanger sur ses impressions et voir les différents sentiments que peuvent susciter la même lecture. 

Et je peux vous dire que La Religieuse a de quoi en susciter !
Tantôt martyrisée par une supérieure cruelle puis par une autre tournée vers les plaisirs saphiques, Suzanne va connaitre bien des tourments en épousant cette voie qu'elle n'a pas choisi.  
C'est un récit à la fois poignant et dérangeant; le parcours de Suzanne m'a à la fois révolté et profondément gêné.
Cette jeune fille est d'une naïveté et d'une innocence qui peine face à la perfidie des personnages qu'elle rencontre. Mais Suzanne, sous ses apparences de petite chose fragile, a aussi une grande force de caractère. Elle ne cherche jamais la vengeance et pardonne même à ses pires bourreaux. Son caractère a de quoi dérouter pour une femme qui cherche à tout prix à rompre ses vœux et pourtant, même si je suis sure que sa naïveté en agacera plus d'un, Suzanne est vraiment très attachante.

En ce qui concerne la plume de Diderot, j'ai été agréablement surprise de voir qu'elle n'avait rien de compliqué. Elle est très fluide et il n'y a aucune difficulté à la comprendre. Pas de phrases alambiquées ou de vocabulaire qui nécessite d'avoir plus souvent le nez dans un dictionnaire que dans le bouquin !

Le ton du roman m'a aussi beaucoup étonné. J'ai trouvé que Diderot n'y allait pas de main morte lorsqu'il s'agissait de décrire les souffrances de Suzanne. Je pense que c'est sans doute amplifié par le fait que ça se passe dans un couvent et que contrairement à Suzanne, le lecteur est loin d'être aussi naïf, mais certains passages m'ont horrifiés et d'autres mis vraiment mal à l'aise.
Pour moi la deuxième partie a vraiment été la plus dérangeante; Suzanne est dans l'ignorance totale de ce qui lui arrive. Elle sent au fond d'elle un malaise et en même temps, elle est persuadée que ce qu'elle fait avec sa supérieure est totalement innocent.

J'ai tout de même un point négatif à relever : la fin de l'histoire est très rapide. Je ne vais pas spoiler mais les événements du dénouement qui se passent en plusieurs jours voire en plusieurs semaines, tiennent en quelques pages alors que Diderot ne nous a épargné aucun détail des souffrances de Suzanne auparavant. Elle finit d'ailleurs assez brutalement, nous laissant un peu sur notre fin quant à l'avenir de la jeune femme.

Malgré tout, ce fut pour moi une très bonne relecture. L'histoire est prenante et Suzanne est très attachante.
C'est un livre bouleversant et à la portée de tous que je vous conseille sans hésiter !

Madame C.