Qui est la mystérieuse nouvelle locataire de Wildfell Hall ? D'où vient cette artiste qui se fait appeler Mrs Graham, se dit veuve et vit comme une recluse avec son jeune fils ? Son arrivée alimente toutes les rumeurs dans la petite commune et éveille l’intérêt d'un cultivateur, Gilbert Markham. Nait entre eux un amour qu'elle refuse de toutes ses forces. De plus, la famille de Gilbert s'oppose à cette relation et, petit à petit, Gilbert se met lui-même à douter de sa secrète amie. Pourquoi son voisin, Frederick Lawrence, veille-t-il si jalousement sur elle ? Entretiendraient-ils une liaison ?
Si j'aime Jane Austen, j'aime encore plus les sœurs Brontë.
Charlotte a donné vie à mon héroïne absolue sous les traits de Jane Eyre et Emily m'a bouleversé avec ses personnages torturés par leurs passions destructrices dans Les Hauts de Hurlevent.
Ces deux sœurs ont tellement marqué ma vie de lectrice que j'ai forcément voulu faire durer le plaisir et j'ai sauté sur l’œuvre de la troisième.
Je me suis alors penchée sur Agnès Grey, son premier roman, et à la fin de ma lecture... je me suis dit que forcément, sur trois sœurs, toutes ne pouvaient pas être des génies de la littérature.
Puis est arrivé La Recluse de Wildfell Hall !
Et là, l'expression jamais deux sans trois n'a jamais aussi bien prit tout son sens !
Sur la quatrième de couverture, il est écrit que ce roman "analyse sans concession la place des femmes dans la société victorienne" et qu'il est "considéré comme l'un des premiers romans féministes". Promesse tenue !
J'ai vraiment été surprise du ton et de la prise de position de l'auteur, surtout pour l'époque et sachant qu'elle était la plus pieuse des trois sœurs. Même Charlotte lui en voudra d'avoir fait publié un roman qui défi autant la morale.
De plus, si vous connaissez un peu les sœurs Brontë, vous savez sans doute que cette grande famille comptait un frère, Branwell, dont la déchéance a inspiré Anne pour ce roman.
Et Anne nous dépeint cette déchéance sans prendre de gants, teintée de peur et de violence. Elle expose les faits sans rien nous épargner et si aujourd'hui cela ne nous semble pas révolutionnaire, il ne faut pas oublier de se mettre dans le contexte de l'époque pour se rendre compte qu'Anne ni va vraiment pas de main morte.
Si suivre Gilbert Markham au début et à la fin du roman ne m'a pas déplut bien que je n'ai pas du tout aimé ce personnage, la majorité du récit se fait à travers le manuscrit de Mrs Graham, la fameuse recluse, qui livre son histoire et son parcours chaotique en n'omettant aucun détail.
Son histoire est vraiment haletante et même si beaucoup de dénouements sont assez prévisibles, une forte empathie se crée avec ce personnage, même si on ne comprend pas toujours ses choix. Mais ce qui fait d'elle un personnage attachant, c'est justement son caractère juste et droit, sa bonté et son aptitude à voir ce que les gens ont de meilleur en eux, de garder espoir et de croire qu'ils peuvent changer.
On retrouve également cette petite société mesquine qui se nourrit de ragots, ne juge que sur les apparences et se permet de donner des leçons sur un style de vie qu'ils condamnent d'après leur seule vision étriquée ou celle que leur dicte le vicaire du village.
Certains personnages sont d'une malveillance et d'une méchanceté malsaine, là où d'autres sont de véritables agneaux naïfs qui finissent par se faire prendre au piège.
Et n'allez pas croire que les femmes sont systématiquement celles qui subissent la perfidie des hommes, certaines d'entre elles en prennent aussi pour leur grade.
J'ai un peu l'impression de partir dans tous les sens (ce qui arrive très souvent lorsque ma lecture a été un coup de cœur, j'ai une dizaine d'informations qui fusent dans ma tête et je n'arrive plus à faire le tri), mais il y a tellement de choses à relever dans ce roman qu'il me faudrait des jours pour achever cet article, sans parler du risque de vous spoiler.
Pour conclure je dirais que j'ai passé un merveilleux moment avec ce livre, tiraillée entre l'envie de le finir au plus vite pour connaitre le dénouement, et la tristesse de devoir le refermer pour le ranger.
C'est un roman comme je les aime, avec une histoire haletante, des personnages attachants et un message profond, à la fois subtil et percutant.
Madame C.